Cité Blanche Gutenberg

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Allocution "Hommage Abdenbi Guemiah"

En ce jour du 30ème anniversaire de la disparition tragique de Abdenbi Guémiah, nous -ses amis et anciens habitants de la cité Gutenberg- avons souhaité lui rendre hommage de la meilleure des façons qu’il soit : dans le respect et dans la dignité.

 

Trente ans plus tard, Abdenbi GUEMIAH nous a donné rendez-vous ce matin pour nous rappeler que nous sommes seulement de passage sur cette terre. De là où tu trouves désormais, saches que tu nous auras permis de nous rassembler, de nous retrouver plusieurs décennies après que nos routes se soient séparées.

 

Avec cette cérémonie solennelle, en présence de la famille GUEMIAH, nous -Amis du blog de la cité blanche- avons souhaité faire vivre sa mémoire.

 

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Le 23 octobre 1982, par un temps d’automne sans doute semblable à celui d’aujourd’hui,  Abdenbi se dirigeait paisiblement vers son domicile familial quand il fut atteint à l’abdomen par une balle tirée d’un pavillon situé à quelques encablures des premiers bâtiments de la cité.  Très grièvement blessé, il succomba à ses blessures, treize jours plus tard en emportant avec lui cette part d’humanité qui le singularisait tant.

 

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La cité blanche venait de perdre un de ses enfants les plus précieux.

 

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Trente ans après, ce jeune étudiant âgé de 19 ans demeure présent dans nos mémoires. Sa disparition  brutale était une déchirure profonde pour l’ensemble des habitants de la cité Gutenberg. Meurtris au plus profond de notre chair, NOUS qui étions ses voisins, NOUS qui étions ses amis, NOUS qui étions ses complices avions pris conscience, alors, que n’importe lequel d’entre NOUS aurait pu être la victime de cet odieux crime raciste et sécuritaire.

 

Oui ! Nous aurions pu être la cible de l’auteur des coups de feu condamné à 12 ans de réclusion criminelle.

 

Cette période tendue traversée par notre pays était rongée par de nombreux assassinats d’enfants immigrés. Je me remémore encore la déclaration du Secrétaire d’Etat François AUTAIN, à l’issue de sa visite auprès de la famille GUEMIAH, quand il déclara : « Abdenbi a été abattu de sang froid parce qu’il a commis le crime d’être jeune et arabe ».

 

En dépit de cette injustice, en dépit de notre colère nous avons su rester dignes et responsables, à l’image de ce que fut notre frère Abdenbi de son vivant.

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  • Homme de cœur, Abdenbi avait cet amour passionné pour l’humain. L’humain était le fil de sa vie.  Dans la lueur de ses yeux jaillissaient la tendresse, la sincérité et la générosité.
  • Homme d’esprit, il était curieux car il avait une soif permanente d’apprendre, de comprendre et d’échanger. Esprit toujours fécond, brillant et respecté Abdenbi avait une aura et une culture qui s’imposait à tous. Abdenbi était un homme que l’on écoutait car son rayonnement intellectuel ne laissait personne indifférent.
  • Homme d’action et d’engagement, Abdenbi avait le sens du dévouement au bien du plus grand nombre. Soucieux de protéger les plus jeunes générations des affres de la délinquance, il mettait tout en œuvre pour inscrire au cœur de la mission de l’association Gutenberg, dont il fut le premier trésorier, la réussite éducative et scolaire.  
  • Homme chaleureux et généreux, Abdenbi aimait partager des moments conviviaux, particulièrement avec les enfants. Qui ne se souvient pas de Abdenbi arpentant les quatre coins de la cité, guitare en bandoulière, à la recherche d’enfants pour mieux les regrouper autour de lui et leur fredonner quelques airs de Brel ou de Maxime Le Forestier ?
  • Profondément croyant et charitable, Abdenbi incarnait le désintéressement, la loyauté et le volontarisme. Sa foi en Dieu constituait -sans doute- l’essence de son énergie inépuisable et de sa sagesse.

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Permettez-moi de formuler au moins deux certitudes :

  • La première, c’est que Abdenbi nous manque.
  • La seconde, c’est que nous lui devons beaucoup.

Dès l’annonce de sa mort, Abdenbi était devenu le symbole de la lutte pour la résorption des cités de transit en région parisienne. Hélas, il aura fallu attendre ces circonstances tragiques pour qu’enfin les pouvoirs publics locaux comme nationaux -qui jusqu’à lors avaient détourné leur regard sur nos conditions de vie, s’étaient souvenus de la présence de plusieurs centaines de familles tassées  dans des ghettos à moins de cinq kilomètres à vol d’oiseau de la plus belle avenue du monde.

 

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En irriguant ta mémoire,  nous souhaitons que celle-ci ne soit pas oubliée par nos parents. En cultivant ta mémoire, nous souhaitons qu’elle ne soit pas abandonnée par nous, alors jeunes adolescents.  En rappelant ta mémoire, nous souhaitons qu’elle s’inscrive dans le patrimoine mémoriel de tout un chacun d’entre nous. Nous puiserons dans nos énergies et dans nos forces les plus profondes pour que ce patrimoine soit transmis aux jeunes générations afin qu’elles sachent ce qu’il s’est passé durant ces années où leurs ascendants avaient été oubliés et négligés.

 

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En rendant hommage à Abdenbi GUEMIAH, aujourd’hui,  il ne s’agit pas de procéder à une rétrospective nostalgique. Non ! mais de nous tourner clairement vers l’avenir.

 

La mémoire de Abdenbi doit appartenir, sans équivoque, à l’histoire de notre ville. Natif de Nanterre, arraché à la vie à Nanterre, homme de paix et de rassemblement apprécié des nanterriens son nom, sa mémoire doivent être gravées dans le calendrier des cérémonies de la ville.

 

Dès la semaine prochaine, et bien que Le Maire de Nanterre ait décliné notre invitation le conviant à prendre part à cette présente cérémonie, nous porterons à ce dernier le message de nombreux nanterriens désireux de célébrer, chaque année et non tous les trente ans, la mémoire de Abdenbi GUEMIAH.

 

Aussi, vous êtes de plus en plus nombreux à considérer que la mémoire de Abdenbi mérite beaucoup plus qu’une simple plaque commémorative apposée au fond d’un parvis arpenté par les seuls élèves du collège. Ensemble, nous lui porterons la revendication légitime de mettre sur pied un groupe de travail dont la mission consistera d’une part, à mettre en lumière la mémoire de Abdenbi GUEMIAH et d’autre part, de baptiser, à brève échéance, une artère ou un bâtiment municipal du nom de Abdenbi GUEMIAH.

 

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Ces messages seront portés à destination du premier magistrat de la ville sous le sceau du respect de la mémoire du défunt et de sa famille, dans la sérénité et dans un esprit d’unité et de rassemblement.

 

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Avant de céder la parole à Cheikh Si Moussa TOUHAMI, permettez-moi, au nom de mes amis du blog de la cité blanche sans qui cette cérémonie n’aurait pu avoir lieu, de remercier très chaleureusement la famille GUEMIAH pour avoir accepter spontanément, dès le mois de juin dernier, l’idée d’une cérémonie d’hommage à Abdenbi.

 

Au nom de mes amis, au nom de toutes celles et tous ceux qui ont bien voulu répondre à notre appel en cette fin de matinée, vous dire MERCI. Merci pour votre confiance. Merci pour votre courage.

 

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Comptez sur nous pour que la mémoire de Abdenbi soit gravée à jamais dans nos cœurs.

 

LES AMIS DU BLOG DE LA CITE BLANCHE GUTENBERG

 

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03/11/2012
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